Deux covers pour l’édition UK de Vogue.
Interview originale en anglais disponible ici.
Texte : Giles Hattersley
Photoshoot : Steven Meisel
Stylisme : Edward Enninful
Les photos sont disponibles dans notre galerie :
Traduction réalisée par Planete Adele.
Adele, la renaissance : l’icône britannique se confie sur son divorce, son image, sa romance et son disque qu’elle qualifie d’auto-rédemption.
Ses chansons remarquables sur la rupture et la rédemption ont permis à Adele de conquérir des millions de fans. Aujourd’hui, elle déclare à Giles Hattersley, dans sa première interview depuis cinq ans, qu’elle est prête à sortir son album le plus fort à ce jour. Photographies de Steven Meisel. Stylisme par Edward Enninful.
C’est tout un art la méthode Adele : être la mégastar la plus difficile à apercevoir au monde n’est pas un statut que l’on obtient en ratant sa sortie de limousine. C’est la fin de l’après-midi à Manhattan et sa Mercedes surbaissée se faufile dans le parking au sous-sol de l’hôtel Four Seasons. Toutes ces précautions sont nécessaires pour éviter à l’artiste aux 15 Grammy Awards d’être photographiée à son insu. Derrière des vitres occultées, on jacasse sur la banquette arrière. Bien avant que la voiture ne se soit vraiment arrêtée, Adele – ricanante, fascinante, complexe – a ouvert sa portière au milieu d’une phrase et, tête baissée, s’engage sur le parking à toute vitesse.
J’essaie d’attraper ma ceinture de sécurité et mon matériel d’enregistrement, je me précipite derrière mais je laisse tomber mon sac par terre alors qu’un agent de sécurité, un peu stressé, tient la porte de l’hôtel. Je mets trop de temps, et quand je rattrape Adele, quelque chose comme de l’inquiétude et un peu comme de l’agacement, s’affiche sur son visage. Il n’y a pas de temps à perdre. Comme dans les thrillers des années 90, on s’est précipités à travers des portes battantes dans une cuisine devant des cuisinières qui sifflent et du personnel tiré à quatre épingles. On traverse ensuite un bar et on atterrit – enfin – dans une salle privée caverneuse, vide, à l’exception de deux cocktails posés sur une table. Enfin bien installée dans sa bulle d’intimité, la chanteuse qui a sorti les premier et quatrième albums les plus vendus du 21e siècle se détend. C’est normal. C’est vraiment tout un art d’être Adele.
Adele est enfin de retour. Pour commencer cette interview, revenons un peu en arrière, loin de cet hôtel. Je dois dire que ce fut un plaisir de la rencontrer en chair et en os pour la première fois, quelques heures plus tôt. Cinq longues et tumultueuses années se sont écoulées pour la star – d’un point de vue temporel, bien sûr, mais aussi d’un point de vue personnel – depuis sa dernière interview (pour Vanity Fair). Présente à New York pour quelques jours, afin d’être photographiée par Steven Meisel pour British Vogue, elle tient à assister à l’exposition Willi Smith et a ainsi demandé à me rencontrer, pour la première fois afin de commencer l’interview, au Cooper Hewitt, dans l’Upper East Side, dans l’ancien manoir d’Andrew Carnegie, situé en face de Central Park. Alors que je me rends dans les jardins de la bâtisse, son entourage m’informe qu’elle est dissimulée derrière un treillis. On peut dire que la procédure pour cette première rencontre me fait penser à Greta Garbos (une actrice très connue entre 1920 et 1930 mais également très discrète).
Bien, personne ne l’a vue, c’est bon ? Dès lors, des questions me traversent l’esprit. Sera-t-elle heureuse ? Aura-t-elle le cœur brisé ? Sera-t-elle devenue très « LA » ? Sera-t-elle mince ? Ces milliers de titres de tabloïds sur son physique et sur sa vie résonnent dans ma tête et puis – boum – elle est devant moi, assise à une table au milieu de la flore et de la faune, aussi nerveuse, glamour et rare qu’un léopard des neiges. Adele est là avec cette touffe de cheveux couleur caramel, enivrante avec son parfum Byredo, en double jean patchwork Etro, habillée d’un gilet Fashion Nova et portant des talons en cuir blanc. Adele me tend sa main manucurée, une poignée de main ferme mais flottante est échangée. Elle est suivie de la plus réconfortante des salutations : « ‘Salut, je suis Adele. »
Et l’interview commence : « Moi, ça va super, et toi ? » me lance-t-elle avec son accent cockney inchangé. (Aussi improbable que cela puise paraître, elle a, avec elle, un petit panier de friandises et me passe un jus vert). « Enfin, pour être honnête, pas totalement. Je dois me préparer à être de nouveau célèbre. Je n’aime pas vraiment ça. » Mais oui, elle peut, enfin, confirmer : Adele est de retour. Le single est imminent et l’album approche. Elle est, une fois de plus, prête à bouleverser les émotions d’un milliard de fans de musique, à livrer le dernier chapitre des révélations de son cœur. Pour être honnête, j’ai l’impression qu’elle est arrivée au bon moment. Dans un monde qui n’arrive pas à se mettre d’accord sur grand chose, nous pouvons peut-être nous mettre d’accord sur une chose, ou du moins, sur une personne : Adele.
Elle n’a pas parlé à un journaliste depuis 2016 (depuis Vanity Fair). Entre temps, de nombreuses choses se sont passées : une pandémie est apparue et Adele est devenue une mère célibataire, elle s’est mariée et a divorcé. La chanteuse vit essentiellement loin des réseaux sociaux et du monde des célébrités. Pour les journalistes, Adele vit dans une « enceinte fermée à Beverly Hills » tout juste à côté de Jennifer Lawrence. Pour une certaine catégorie de Britanniques qui aiment piquer là où ça fait mal, Adele ne saurait plus ce qu’est la réalité et la vraie vie – mais ce n’est pas le cas. Une fois les plaisanteries formelles passées, il ne faut que quelques minutes pour en venir à ses exs qu’elle chante dans ses chansons. « Je dois vraiment m’adresser à moi-même maintenant », dit-elle, sincèrement. « Au lieu de dire à mes exs : « Espèce de… » » à ce moment-là, elle lâche un joli « connard » et éclate de rire.
Donc elle va très bien. Confinée en Californie avec son fils, Angelo et une pléiade d’animaux domestiques, son style de vie a radicalement changé comme celui d’un peu tout le monde. « Pendant le confinement, j’étais en mode : « Mon fils doit se connecter à Zoom ! C’est vraiment trop tôt pour boire un spritzer (mélange de vin et d’eau pétillante) ? » Il me disait : « Je veux devenir un YouTuber ». Et j’étais là : ‘Je suis la mauvaise personne à qui dire ça.' » La plaisanterie avec Adele, c’est fabuleux. À un moment donné, on parle de l’ancien ministre de la santé Matt Hancock, dont la romance avec une collaboratrice qu’il avait embauchée avec l’argent public du Royaume-Uni, l’a fait démissionner cet été. En mode Peggy Mitchell, Adele grogne : « Le sale type ! ». Puis, imaginant sans doute les gros titres de demain, elle a eu l’air un peu paniqué avant de finalement hausser les épaules. Peu importe !
C’est officiel, on peut se rassurer : Adele est toujours Adele. L’est-elle encore réellement ? Ayant l’honneur d’être le premier à poser cette question, je demande où se trouve la reine du chagrin d’amour de 33 ans, qui n’a maintenant plus 19, 21 ou 25 ans. « J’ai l’impression que cet album est une auto-destruction », répond-elle prudemment, « puis une auto-réflexion et enfin une sorte d’auto-rédemption. Mais je me sens prête. Je veux vraiment que les gens entendent ma version de l’histoire cette fois-ci. » Sur ce, elle fouille dans son sac à main et me tend une paire d’AirPods.
Sous le soleil chaud de l’après-midi, les premières notes d’une chanson dont elle ne veut pas encore me révéler le nom arrivent à mes oreilles. Un arrangement lent, puis – pow ! – cette voix. « Go Easy On Me… » supplie le refrain, qui se trouve entre des couplets qui évoquent son enfance difficile, son mariage perdu et les leçons apprises sur la famille, l’amour et l’abandon en cours de route. Sa voix n’a jamais été aussi belle que sur ce morceau. Assise en face de moi, elle oscille entre l’observation de l’horizon au loin et des sourires chaleureux qui vous prennent au dépourvu. Pour les enfants ayant vécu un divorce, la chanson est assez émouvante.
Elle l’a enregistrée – comme une grande partie de l’album – pour son fils, dit-elle, alors que, les yeux déjà un peu humides, je lui rends ses écouteurs. « Mon fils a eu beaucoup de questions. De très bonnes questions, des questions vraiment innocentes pour lesquelles je n’ai tout simplement pas eu de réponse. » « Comme quoi ? », lui demandais-je. « ‘Pourquoi vous ne pouvez plus vivre ensemble ?' » Elle soupire. Fini les joueurs de sentiments et les goujats qui furent pendant longtemps l’inspiration de ses chansons (principalement). C’est le côté maternel qui a pris le dessus. « J’ai eu l’impression que je voulais lui expliquer, à travers ce disque, quand il aura 20 ou 30 ans, qui je suis et pourquoi j’ai volontairement choisi de bouleverser et de démanteler toute sa vie dans le but de poursuivre mon propre bonheur. Ça l’a rendu vraiment malheureux à certains moments. Et c’est une vraie blessure pour moi dont je ne sais pas si je pourrai un jour guérir. »
Elle fait preuve à la fois de confiance et de « shell shock » (en français : l’obusite. Il s’agit d’un stress post-traumatique que ressentaient les soldats de la Première Guerre mondiale), un peu comme une personne qui sort d’une longue période d’auto-examen. « Ce n’est pas comme si quelqu’un s’en prenait à moi », dit-elle, « mais c’est comme si j’avais abandonné mon mariage. Être de nouveau plus tolérance et gentille envers moi-même. Easy On Me est la première chanson que j’ai écrite pour l’album et je n’ai rien écrit d’autre pendant six mois parce que je me disais : ‘Bah voilà, j’ai tout dit' ». Les premières notes, explique-t-elle, lui sont venues alors qu’elle « chantait a cappella sous la douche » un jour de 2018… Attendez, 2018 ? Quelque chose ne va pas. Pour comprendre, Adele Adkins a épousé Simon Konecki (fondateur de l’organisation caritative Drop4Drop, son partenaire de longue date et le père de leur fils de presque neuf ans) en 2016 (elle l’a appelé « mon mari » lorsqu’elle a reçu un Grammy début 2017) et se sont séparés en 2019. Leur divorce est finalisé plus tôt cette année. Mais même si on pensait connaitre la vie d’Adele, la réalité est tout à fait différente. (Si Adele a chanté le début de cette chanson en 2018, ceci laisse sous-entendre que le mariage d’Adele battait de l’aile déjà à l’époque)
Adele adore brouiller les pistes que ce soit sur sa vie privée ou professionnelle. En février 2020, elle a été filmée au mariage de sa meilleure amie en train de dire aux invités : « Mon album va sortir en septembre 2020 ! ». « Je sais », dit-elle en soupirant. Ses traits se transforment en un sourire gêné. « J’étais bourrée. Je célébrais le mariage, j’étais bien… » (il s’agissait du mariage de sa meilleure amie, Laura Dockrill). La nouvelle a très vite filtré sur les réseaux sociaux mais bien sûr, la pandémie est arrivée et tout a été mis en attente.

Le sujet était déjà tout trouvé. « Je pensais que ça parlerait de mon divorce, mais ce n’est pas le cas. En fait, » précise-t-elle, « cette chanson (Easy On Me) l’est évidemment. » (Au cours des heures que nous passons ensemble, elle me fera écouter quatre autres chansons – elles ont toutes l’air de parler de divorce, pour être honnête). Elle me tend à nouveau les écouteurs et appuie sur la touche « play » de son téléphone. Cela résulte en une expérience troublante : je suis là en train d’écouter l’une des plus grandes artistes de la musique populaire chanter la fin d’une histoire d’amour pendant qu’elle guettait mes réactions.
Écrite juste après son divorce, alors qu’Adele recommençait à flirter, les défauts des hommes y sont décrits en détail. La paresse, les sentiments opaques et l’éloignement sont détaillés tout en implorant à son date de lui accorder un peu plus de respect. « Mais dis-moi ce que tu penses vraiment », me demande-t-elle. Je ris un peu nerveusement quand la chanson se termine et elle a l’air contente. « Le refrain est vraiment percutant et criant de vérité ! ». Elle acquiesce joyeusement. « Tu imagines les couples qui vont l’écouter dans la voiture ? Ce serait tellement gênant. Je pense que beaucoup de femmes vont se dire : ‘C’est fini, j’arrête' ».
« Cette chanson parle évidemment de ce qu’il s’est passé mais je voulais la mettre sur l’album pour montrer à Angelo ce que j’attends de lui quand il vivra avec son partenaire, que ce soit une femme, un homme ou autre. Après avoir traversé un divorce, mes exigences sont très élevées. Il y a une très grande liste de critères à remplir. » La fin de sa relation avec Simon était-elle plus une fin d’une étape dans sa vie qu’une implosion ? « En fait », dit-elle, à nouveau avec prudence, « cela n’allait juste plus de mon côté. Je ne voulais pas finir comme beaucoup d’autres personnes que je connaissais. Je n’étais pas au fond du trou mais je l’aurais été si je ne m’avais pensé à moi en priorité. Mais, ouais, rien de mauvais entre nous n’est arrivé. »
Adele continue : « Mon anxiété était si terrible que j’oubliais ce que j’avais ou n’avais pas dit à Angelo au sujet de la séparation. ». Son thérapeute de l’époque lui a suggéré d’enregistrer des notes vocales de leurs conversations pour ne pas se réveiller effrayée les matins en se demandant ce qu’elle lui avait dit (un extrait de l’une d’elles apparaîtra sur un titre de l’album qui lui est dédié). « Évidemment, Simon et moi ne nous sommes jamais battus pour lui. », dit-elle. « Angelo était en mode ‘Je ne comprends pas vraiment.’. » Elle soupire. « Je ne comprends pas vraiment non plus, à vrai dire. Il y a des règles qui sont établies dans la société sur ce qui se passe et ne se passe pas pendant et après le mariage mais je suis une personne très complexe. Je lui ai toujours fait savoir ce que je ressentais dès mon plus jeune âge car je me sentais assez désemparée. »
Elle en a constaté les effets durant sa propre enfance. « Mes parents étaient très perturbés », dit-elle. Sa mère, Penny Adkins, et son père, Mark Evans (décédé en début d’année 2021) se sont séparés peu de temps après sa naissance et sa relation avec son père a été tendue. Il lui a fallu une bonne partie de sa vie d’adulte pour s’en remettre. Elle accuse aussi le fait d’avoir été trop prudente et indécise dans ses décisions. « Ce ne sont pas les mauvaises décisions qui foutent en l’air nos enfants », dit-elle, en faisant référence au gourou de l’auto-assistance Glennon Doyle (un de ses favoris), « ce sont les indécisions ». Je lui demande comment va son anxiété maintenant. « J’ai appris beaucoup d’outils au cours de ma thérapie mais je me contente aussi de vivre avec mon angoisse. Je trouve que l’anxiété empire quand on essaie de s’en débarrasser. »
« Mais j’étais terrifiée », dit-elle, en parlant de sa période la plus sombre. « Les gens étaient partout, ils essayaient d’obtenir des histoires et je détestais ça. J’étais gênée. J’étais vraiment gênée. Ce sentiment de n’arriver à rien dans ma vie. En tant que femmes, nous avons été formées à continuer d’essayer (d’aimer et de faire fonctionner le mariage) et ce même par les films que nous regardions quand nous étions petites. À l’époque, ça m’a brisé le cœur mais je trouve ça intéressant maintenant. De voir comment on nous dit de faire de la lèche et d’être une femme parfaite. » Elle hausse les épaules. « Bon, on s’en fout de ça. On entre et on voit l’exposition ? »
En général, le musée Cooper Hewitt est fermé le mercredi mais le personnel a gentiment ouvert spécialement pour nous (enfin, je dis nous mais c’est plus pour Adele). La chanteuse tient à voir l’exposition Willi Smith : Street Couture. L’exposition est consacrée au génial créateur américain de la fin des années 1970 et des années 1980 à qui on doit une approche révolutionnaire de la démocratisation de la mode. On s’intéressera à son héritage en tant que créateur noir bien plus tard. Adele ne tarde pas à se pencher sur les photographies de studio, les vidéos et les pièces d’archives de la carrière de Smith. « Il a dessiné l’une des robes de mariée de la mère de mon amie », dit-elle et elle évoque, avec sérieux, la manière dont il a radicalement repensé l’identité de la mode avant de mourir prématurément en 1987, à 39 ans.
À l’exception d’une poignée d’employés du musée, de membres de son équipe et d’agents de sécurité qui traînent dans le hall, nous avons l’endroit pour nous deux. Cela lui manque de ne pas pouvoir accéder aux expositions, dit-elle alors que nous nous promenons dans les salles. Si elle s’y prend bien, elle a « environ 20 minutes » avant que le premier fan ne la surprenne et qu’il y ait une mêlée générale. De plus, Los Angeles n’a pas la même variété d’espaces et de lieux culturels que sa ville natale, Londres. Je lui demande pourquoi, selon elle, son déménagement en Californie l’a rendue un peu plus célèbre. « Eh bien », répond-elle, délicieusement impassible, « je suis devenue mince et suis en bonne santé. C’est tout à fait le style de L.A., je suppose. »
Ah oui, ça. Tapez « régime Adele » dans Google et vous obtenez une avalanche de résultats dont une masse de contenus rédigés depuis mai 2020, date à laquelle elle a posté sur Instagram un cliché d’elle vêtue d’une minirobe noire, pris dans son jardin le jour de son anniversaire (plus de 12 millions de likes). C’est un sujet sur lequel elle semble à la fois profondément à fleur de peau et un peu énervée. « Je pense que l’une des raisons pour lesquelles les gens ont perdu la tête à propos de ma silhouette est que cette perte de poids s’est déroulée sur une période de deux ans », dit-elle en évoquant une perte de « 30 kilos ».
Elle explique : « C’était à cause de mon anxiété. En faisant du sport, je me sentais mieux. Il n’a jamais été question de perdre du poids mais de devenir forte et de m’accorder le plus de temps possible chaque jour sans mon téléphone. J’en étais devenue accro. Je fais de la musculation deux ou trois fois par jour. » Trois fois par jour ? « Oui », répond-elle, sans détour. « Je fais ma musculation le matin puis je fais normalement de la randonnée ou de la boxe l’après-midi et enfin je termine par mon cardio le soir. J’étais pratiquement au chômage quand je faisais ça. Et je le fais avec des entraîneurs ». Elle comprend très bien que c’est réservé pour une élite. « Ce n’est pas faisable pour beaucoup de gens », dit-elle, un peu gênée.

« Mais j’avais besoin d’être accro à quelque chose pour me remettre les idées en place », poursuit-elle. « Ça aurait pu être le tricot mais ce n’a pas été pas ça. Les gens sont choqués parce que je n’ai pas partagé mon ‘voyage’. Ils ont l’habitude que les gens documentent tout sur Instagram et la plupart des gens dans ma situation obtiendraient un gros contrat avec une marque de régime. Je n’en avais rien à faire. Je l’ai fait pour moi et pour personne d’autre. Alors pourquoi l’aurais-je partagé ? Je ne trouve pas ça fascinant. C’est mon corps. »
« Il y a toujours eu une fascination autour de votre image, n’est-ce pas ? » lui demandais-je. « Cela fait 12 ans que les gens parlent de mon corps. Ils en parlaient avant que je perde du poids. Mais ouais, peu importe, je m’en fiche », dit-elle, tout en me donnant l’impression qu’Adele en accorde quand même un peu d’importance. « Vous n’avez pas besoin d’être en surpoids pour être ‘body positive’, vous pouvez être de n’importe quelle forme ou taille ».
Elle affirme qu’il y a maintenant toute une industrie qui spécule sur sa perte de poids et en profite. « Vous savez, toutes les histoires écrites sur moi sont absolument fausses. Je n’ai jamais rencontré de gens qui ont dit : « Je l’ai formée ». C’est dégoûtant. Je n’arrive pas à m’en remettre. Une femme de Pilates que je n’ai jamais rencontrée de ma vie a osé raconter cette histoire ! Et je n’ai fait aucun régime », ajoute-t-elle.
Et qu’en est-il de ces articles qui disent que vous avez suivi le régime Sirtfood (une nouvelle version du régime : peu de calories, des aliments complets, beaucoup de thé vert et de myrtilles) ? « Non », dit-elle. « Je n’ai pas fait ça. Pas de jeûne intermittent. Rien du tout. Au contraire, je mange plus qu’avant parce que je fais beaucoup d’exercice. Et aussi, dit-elle, tout ce truc de ‘Gets Revenge Body’… Oh mon Dieu. Putain ! », crie-t-elle dans le musée vide.
Elle rit. « C’est ridicule. Je pense que c’est parce que les gens aiment décrire la femme divorcée comme étant hors de contrôle, en mode, ‘Oh elle doit être folle’. Elle a dû décider qu’elle voulait devenir une pute. Parce que qu’est-ce qu’une femme sans mari ? » Au même moment, Adele fait voler ses cheveux dans les airs. « C’est des conneries. »
Elle en a assez de ses chaussures à talons. Alors que nous retournons dans le hall, un assistant se présente pour les échanger contre une paire de chaussures plates. Les cheveux sont relevés à l’aide d’un chouchou et nous nous asseyons sur une banquette pour discuter. « En réalité », dit-elle, « le déménagement à Los Angeles était une question de qualité de vie ». « La plupart de ma vie se passe dans une voiture ou à l’intérieur d’un bâtiment », dit-elle. « Je voulais de l’air frais et un endroit où je pourrais voir le ciel. De plus, une fois que j’ai eu Angelo, en Angleterre, si vous n’avez pas de plan avec un jeune enfant et qu’il pleut, vous êtes foutu. Et le genre de maison que j’ai à Los Angeles, je ne pourrais jamais me la payer à Londres. Jamais. » Interloquée, je lui demande : « Vous pourriez probablement, non ? ». « Non, j’ai regardé les maisons. C’est des centaines de millions de livres. Je n’ai pas autant d’argent. Ca me donne envie de vomir. »
Les trois maisons d’Adele à Los Angeles sont originales. « C’est un cottage très britannique », dit-elle en parlant de ses choix de décoration, alors que « mon appartement à Londres est très européen. C’est italien ou quelque chose comme ça. Je n’ai même pas envie de m’y asseoir », dit-elle en riant. Le principal avantage de ce cottage à Los Angeles est que Simon a pu s’installer en face. Suite à cette installation, Adele s’est longuement demandée comment elle pouvait séparer sa vie de celle de son ex-mari. »A la fin, je me suis dit : ‘On ne va pas le faire. Tu as acheté la maison en face de la mienne. Rien ne change pour Angelo.' »
En temps normal, elle retourne régulièrement en Grande-Bretagne. Au fond d’elle, le Royaume-Uni lui manque. Terriblement. Elle fait ses courses au Ye Olde King’s Head (« Salad Cream is my vibe »), un « pub-cum-minimart » à Santa Monica et est ravie d’y retrouver son amie, India Standing, qui lui rapporte de Londres des PG Tips, des Percy Pigs et 20 Terry’s Chocolate Oranges. Comme le reste du pays, elle a été folle de l’Euro cet été en le regardant depuis la Californie, même si cela impliquait des horaires décalés. Adele a été furieuse que les stades soient remplis de fans de sport alors que l’industrie musicale est à genoux. « Imaginez si j’avais essayé de jouer au stade de Wembley ? J’aurais été interdite. »

Puis, soudainement, elle s’arrête et appelle : « Salut, chéri ! » Elle rayonne alors qu’un homme s’approche. « C’est Rich », dit-elle en me jetant un regard. Bien que son visage ait été placardé dans tous les grands médias du monde trois jours plus tôt, après qu’il ait été photographié en train d’assister à un match de basket avec une certaine Mme Adkins, il me faut un moment pour comprendre qu’il s’agit de Rich Paul : son nouveau petit ami. Malgré ses 39 ans, il a l’air d’avoir une vingtaine d’années avec une telle aisance, à la fois discrète et bavarde, qu’il est difficile de concilier sa réputation de l’un des plus formidables agents sportifs américains, fondateur du Klutch Sports Group, avec des clients tels que LeBron James. Rich est un homme qui, comme sa nouvelle petite amie, possède une fortune personnelle à neuf chiffres. « Ravi de vous rencontrer », sourit-il. Il est également impatient de voir l’exposition et va donc y jeter un coup d’œil.
« Oui, nous sommes ensemble », confirme Adele. Cela fait quelques mois, même s’ils ont des amis en commun depuis des lustres. « Nous sommes très heureux. » Plus tard, de retour à son hôtel au moment du deuxième cocktail, elle développera : « Et je ne suis pas allée au [match de basket l’autre soir] parce que c’est son métier. J’ai dit : ‘On va voir le match’. » Je lui demande : « Vous sentez-vous stressée lorsque vous sortez à nouveau en public après si longtemps ? ». « Ça l’était avant mais ça ne l’a pas été cette fois-ci parce que ça ne dérange pas Rich. En temps normal, je pense que ça me fait peur parce que c’est très fatiguant tout ce stress. Vraiment fatiguant. »
Simon était plutôt cool avec ça, apparemment. Pourtant, Adele raconte : « Je suis sortie avec des hommes avant Rich, mais ils détestaient ça », dit-elle. « Ils trouvaient stressant de sortir ou d’être vus avec moi. Ça n’a jamais évolué parce que nous n’avons jamais pu vivre des choses ensemble. Rich n’est pas du tout perturbé par tout ça. J’ai l’impression qu’il est suffisamment cohérent et prévenant pour que je me moque de qui est au courant. » Au même moment, ses yeux verts pétillent. « Il est génial. Il est tellement drôle. Il est si intelligent, vous savez. »
De retour au musée, après avoir salué Rich, je me dirige vers la voiture, avec une Adele, 1m80, pressée par peur d’être vue. Alors que nous nous engageons dans la circulation de cette fin d’après-midi, elle me tend à nouveau les AirPods. « C’est à partir de là qu’on entre dans l’autoréflexion. » L’Hudson River (c’est un fleuve à NYC) passe en trombe devant les fenêtres, tandis que, nichée sur la banquette arrière, je suis transportée dans un bar de jazz après les heures d’ouverture. La voix d’Adele frémit dans mes oreilles : « I know how low I can go. » Mais le texte le plus marquant est sans doute : « The road less travelled is a road best left behind. » « J’adore mes paroles sur ce disque », dit-elle tout en étant contente de son travail. Chose rare avec Adele.
Il est clair que l’évolution professionnelle a été à la hauteur de l’évolution personnelle. Sur le plan musical, le nouvel album n’a jamais été aussi éclectique. Comme toujours, elle est fière du secret qui entoure l’album et de ses plans pour sa sortie. « Je pense que je suis en fait l’une des artistes les plus punk qui soient », dit-elle, une lueur sexy dans le regard. « Ma musique, absolument pas. Mais ma façon d’être et de bouger l’est. »
Elle repense à la création de ses anciens hits. « Pendant la création de 21, j’étais bourrée comme un coing ; je ne me souviens vraiment pas de grand-chose, je me rappelle juste avoir été très triste. Pour 25, j’étais évidemment sobre parce que j’étais une nouvelle maman. Pour celui-là, j’étais plus en phase avec ce que les gens pouvaient attendre de moi ou pas. Avec celui-ci », dit-elle à propos de l’album à venir, « j’ai réellement pensé à moi, pour la première de ma vie, en me demandant: « Qu’est-ce que je veux ? » »
Elle a réuni quelques-uns de ses plus proches collaborateurs : le producteur Greg Kurstin, qui a travaillé avec elle sur 25 ; le hitmaker de la pop suprême Max Martin ; et son nouveau favori, Inflo, le producteur londonien connu pour son travail avec Little Simz et Sault. Elle a même fait appel au compositeur et producteur suédois Ludwig Göransson, qui a remporté un oscar pour la musique de Black Panther et qui a travaillé en étroite collaboration avec Childish Gambino. Une fois de plus, cependant, pour tous ceux qui attendent un duo avec Beyoncé ou un couplet de Kendrick, il n’y a pas de vedettes sur le disque. Nous vivons peut-être à l’ère de la collaboration mais, à mon humble avis, lorsque vous êtes l’une des artistes les plus populaires du monde, avoir un duo, ça ne vaut pas la peine. « Ce n’est pas que je ne veux pas avoir un duo », dit-elle d’un air détaché. « Ce n’est pas calculé. C’est juste que ça n’a jamais été bon, il y a toujours une raison qui fait que ça n’aboutit pas. »
En fin de compte, son travail est trop personnel et ne peux être partagé en duo. Est-ce que mettre sa vie dans sa musique est une thérapie ? Je lui pose la question : « J’ai définitivement l’impression que lorsque ma vie part en vrille, j’ai envie d’être en studio parce que personne ne peut m’attraper », répond-elle en regardant la route devant elle. « Je n’ai pas à faire face à des questions, à des problèmes. C’est plus un endroit où je me sens en sécurité. Je ne vois pas ma musique en mode ‘Mon monde s’écroule, j’ai besoin d’aller écrire à ce sujet’. »
L’interview continue. A l’hôtel, j’observe son corps se détendre vraiment pour la première fois de la journée. Elle s’excuse pour la pièce fermée, faiblement éclairée, même en plein jour, équipée d’un épais rideau de velours pour bloquer le monde. « Je voulais être là avec tous les autres », dit-elle. Je me demande si c’est vrai. Adele continue : « mais je ne voulais pas que ça ressemble à une interview ».
Elle nous commande deux martinis au litchi. « Ooh, c’est un peu de moi », chante-t-elle avec délice dès la première gorgée. Si vous avez de la chance, la vie vous offrira une poignée de pur plaisirs et je dirais que faire la fête avec Adele en fait partie. On s’éclate avec elle. Adele s’exprime à propos d’Internet: « Un jour, je sais que je vais finir par regarder des vidéos à n’en plus finir. Par exemple, comme regarder des chiens courir partout. », résume la chanteuse, consternée. Adele évoque aussi son nouveau cercle d’amis social : « Et oui, j’ai des amis à Hollywood ». Adele aborde l’obsession du public pour sa ressemblance avec l’actrice Sarah Paulson : « Mais c’est vrai, c’est assez ressemblant ». (Bien qu’elle insiste sur le fait que sa véritable jumelle de célébrité est Emily Blunt. « Seulement le front », explique-t-elle, en cherchant maladroitement sur Google une photo d’une affiche de A Quiet Place Part II pour le prouver. « Vous voyez ! »)

Elle me joue une autre chanson. « Autodestruction », dit-elle, alors que les AirPods sont installés. Encore une fois, elle ne veut pas révéler le nom mais c’est une chanson qui ressemble le moins à Adele jusqu’à présent – des nuances de Goldfrapp, sa voix échantillonnée et rééchantillonnée sur un rythme hypnotique. Ça sent le tube. « Oh, c’est de la destruction », dit-elle. « C’est moi qui sors et qui me saoule dans un bar. Je bois de l’alcool. Je commence à me disputer si je bois de l’alcool. J’arrive bien à gérer ma consommation, je pourrais boire cinq bouteilles de vin et avoir une conversation normale. »
Pendant un bref passage, au cœur de sa rupture, elle a commencé à sortir dans les clubs de Los Angeles. Elle ne l’avait pas fait depuis la naissance de son fils. « Je pensais que j’étais insouciante mais je ne l’étais pas totalement. Et puis, j’avais des gardes de sécurité derrière moi, donc rien n’a jamais fuité (dans la presse). Je passais toujours par la porte arrière du bar plutôt que par la porte avant. Je me souviens m’être réveillée avec la pire des gueules de bois. J’appelle ça l’angoisse du lendemain. ‘À qui ai-je parlé ?’, ‘Qu’ai-je fait ?’. J’ai perdu mes repères pendant un mois. Je ne fais plus vraiment ça maintenant. »
Se défouler semble assez crucial. Tout a réussi pour la chanteuse : Adele – née et élevée à Londres par une mère célibataire, qui travaillait dans la restauration de meubles et dans l’aide à l’apprentissage des adultes – a été douée dès le départ : passant d’un jeu de guitare dans le parc à des cours de musique, puis à la Brit School, pour enfin décrocher un contrat d’édition et d’enregistrement en l’espace de quelques années d’adolescence. À 20 ans, elle est célèbre, sa voix exquise s’échappant des radios du monde entier. Rapidement, elle a battu tous les records avec une série de Grammys, de Brits et un Oscar. Aujourd’hui, Adele a vendu plus de 120 millions de disques dans le monde – un exploit presque impensable à l’époque moderne surtout après seulement trois albums.
« Certains jours », dit-elle. « Je me sens encore comme cette fille que j’étais avec une guitare à Brockwell Park ». Je lui dis que j’ai été désolé d’apprendre la mort de son père, décédé d’un cancer au début de l’année. Leur relation était tendue, caractérisée au début par l’absence et, plus tard, par l’habitude qu’il avait de donner des interviews payées à son sujet aux journaux. « Nous avons fait la paix, contrairement à ce qui a été dit », dit Adele. « Je lui ai fait écouter mon album une semaine avant sa mort, sur Zoom. Une chose qui s’est définitivement produite dans mon divorce, c’est qu’il a donné un sens au mot « père ». Un grand moment. Je suis tombée très bas et j’ai remonté la pente ! » s’exclame-t-elle. « Et c’est là que j’ai trouvé la paix pour lui pardonner. Il était prêt à partir et il a vécu longtemps avec ça. Alors merci. »
Elle se sent toujours profondément liée à Londres. Son soutien à Grenfell United – l’organisation caritative qui travaille avec les survivants et les proches endeuillés de l’incendie de 2017 de la tour « Grenfell » – est bien présen, même si je n’avais pas réalisé qu’elle s’était rendue sur place jour après jour et ce tout de suite après le tragique accident. « C’était juste le désespoir absolu et personne n’aidait. Je n’arrivais pas à croire qu’il y avait un immeuble en feu au milieu du centre de Londres et que cela n’avait pas provoqué pas plus d’indignation. » Ayant vécu dans un logement social quand elle était enfant, elle ne pouvait pas comprendre la réponse. « Il y a encore beaucoup de bâtiments revêtus de ce matériau. Grenfell ne demandent pas de l’argent, ils demandent juste qu’on enlève ça des murs. Je n’ai jamais vu des rescapés aussi résilients qu’eux de toute ma vie ».
Elle admet qu’elle ne fait pas toujours les choses correctement. Qui peut oublier l’épisode de la photo d’Adele sur Instagram ? En vacances en Jamaïque l’an dernier, rêvant d’être à la fête annuelle de Notting Hill (annulée à cause de Covid), elle a posté une photo d’elle lors d’une fête en plein air, portant des nœuds bantous et un haut de bikini fait de drapeaux jamaïcains. « J’ai pu voir des commentaires du genre ‘Quel culot de pas enlever cette photo’, ce que je comprends totalement. Mais si je l’enlève, c’est comme si ça n’était jamais arrivé », dit-elle. « Et c’est arrivé. Je comprends tout à fait pourquoi les gens ont trouvé que c’était une appropriation culturelle », dit-elle maintenant. Elle s’était dit : « Si vous ne vous habillez pas pour célébrer la culture jamaïcaine – et à bien des égards, nous sommes tellement liés dans cette partie de Londres – alors ça ne sert pas à grand chose de participer à la fête. » Elle fait une pause. Le karma est quand même venu la chercher, ajoute-t-elle, ironiquement. « Je portais une coiffure qui sert en fait à protéger les cheveux afro. Ça a ruiné les miens, évidemment. »
Avec Adele, on apprend rapidement que l’humour et la candeur vont de pair. Elle boit une gorgée de martini, la bouche en cul de poule. Adele veut m’annoncer quelque chose de sérieux. « La chronologie que la presse donne de ma relation et de mon mariage est en fait complètement fausse », dit-elle. « Nous nous sommes mariés quand j’avais 30 ans… et puis je suis partie. » Je lui demande : « Combien de temps après votre mariage avez-vous mis fin à votre relation ? ». « Je ne vais pas entrer dans les détails », dit-elle, « mais je suis embarrassée. C’est très embarrassant. » C’est un moment si rare de non-confession que je lutte contre l’envie de la serrer dans mes bras. « Mon mariage n’a pas duré vraiment longtemps. »
Bien que tout le monde ait cru qu’elle s’était mariée en 2016, ce n’est qu’en 2018 qu’elle et Simon se sont unis. « Je l’ai toujours appelé mon mari car nous avions eu un enfant ensemble », souligne-t-elle. Et elle adore jouer avec la presse. « Ils ne savent rien ! », s’esclaffe-t-elle joyeusement. « Ils ne connaissent pas le nom de mon fils et la date d’anniversaire de mon fils. J’ai le dessus sur tout. J’adore ça ».
« Alors », poursuit-elle, « à 30 ans, toute ma vie s’est effondrée et je n’en ai eu aucun avertissement ». Elle invoque sombrement l’expression « retour de Saturne » (selon les scientifiques, Saturne, la planète, aurait une influence sur les crises de la trentaine, quarantaine et soixantaine.) ayant vu la vie de quelques-uns de ses amis imploser également avec l’arrivée de leur quatrième décennie. Elle s’était juré que « ça ne serait jamais moi », et pourtant, quelques mois après son anniversaire, elle a chamboulé sa vie et a divorcé.
Elle veut me faire écouter une dernière chanson, une oeuvre qui dure sept minutes et qui conclut le nouvel album. C’est un coup de poing. Un délice de cordes, d’inspiration garlandaise, de jazzy, de campy, d’évanouissement, rempli de réflexions qu’on a lors qu’un spectacle se termine. Elle me regarde joyeusement tandis que je me téléporte en l’écoutant. Le film Breakfast at Tiffany’s passait à la télévision dans le studio lorsqu’elle l’a enregistrée et elle dit que c’est la chanson de fin que ce film aurait dû avoir. Mais c’est aussi la coda (la coda est une conclusion d’un morceau de musique) de cette période de sa vie.
« Nous l’avons gardé pour nous pendant très longtemps », dit-elle à propos de la rupture. « Nous devions prendre notre temps parce qu’il y avait un enfant en jeu. C’était toujours du genre : ‘Où est Adele ? Oh, elle travaille’, ou, ‘Où est Simon ? Il est en Angleterre. Pourtant ils sont toujours proches, normalement.' ». Adele conclut : « Je lui confierais ma vie ». « Je suis pleinement consciente de l’ironie de ma situation. J’étais la fille au cœur brisé qui avait trouvé sa moitié. J’ai chanté au Radio City Music Hall : ‘Peu importe, je trouverai quelqu’un comme toi…’ Et puis, oui, au final… » Elle soupire, à la fois amusée et mortifiée : « J’ai merdé. Ça n’a pas marché. »
« Mais d’autres choses ont marché », conclut-t-elle. Et elle va les chanter. « J’ai définitivement choisi la personne parfaite pour avoir mon enfant », dit-elle en réfléchissant sur ces choix de vie. « Cela est l’une des choses dont je suis le plus fière ».